Témoignage de Francine Christophe rescapée du camp de Bergen Belsen.
Appelé aussi "Le chocolat"
Incroyable !
Bouleversant !
Je connaissais.
J'ai été moi-même enfermé en août 1942 dans un camp pendant la guerre, avec mes parents, celui de Rivesaltes près de Perpignan, à l'âge de 6 mois, Nous avions été arrêtés par des gendarmes français, à Annemasse, dans un autobus, alors que nous cherchions à nous réfugier en Suisse. Ces gendarmes nous ont conduit manu militari au camp de Rivesaltes.
Sans ce camp, on dormait sur des châlits infects dans de grandes baraques.
J'étais couvert de punaises, ça grouillait. Les WC étaient dehors, non chauffés, exposés à un vent glacial. Mal nourris, j'avais une diarrhée permanente.
La région Languedoc-Roussillon a conservé en état quelques baraques de ce camp, dans le cadre du mémorial de Rivesaltes, inauguré en 2015, où a lieu une exposition permanente..
C'était un camp français, d'où sont partis 6 convois de trains vers les camps de la mort. 1750 juifs et tziganes ne sont pas revenus.
L'appel se faisait à 6 h du matin, et ceux qui étaient appelés montaient dans ces trains, avec leurs valises. Nous avons eu la chance de ne pas avoir être appelés Ma mère disait à chaque fois à mon père : "Ce n'est pas pour nous, tu verras, on s'en sortira !" Elle avait 20 ans.
Après en avoir réchappé dans des conditions rocambolesques, nous avons réussi à passer en Suisse où ma sœur est née en 1943.
Ma mère avait réussi à se procurer la carte d'identité de madame Daniel Mayer, et s'est présentée à la porte du camp, avec moi dans ses bras, en déclarant qu'elle était en visite, et on l'a laissée sortir.
Quant mon père, il s'est échappé grâce au directeur du camp, qui n'était pas d'accord avec ce qui se passait. Le directeur a demandé à son chauffeur d'aller faire des courses à Perpignan avec une dizaine de prisonniers. Arrivés en ville, le chauffeur s'est installé à une terrasse de café, leur tournant le dos, sous-entendu : "Barrez-vous". Il semblerait qu'il y en a eu 2 qui sont quand même revenus au camp avec le chauffeur.
Quand le Mémorial a été inauguré en 2015, nous avons rencontré un petit-fils d'un soldat allemand qui avait été emprisonné, après la guerre, dans ce camp de Rivesaltes et y était décédé, Cet allemand de Munich, nommé Peter Eisenbach voulait qu'un stèle soit aussi érigée pour les soldats allemands, en plus de celles pour les juifs, les tziganes, les républicains espagnols et les harkis. Nous avons , Chantal et moi, pris fait et cause pour sa demande et avons interpellé Manuel Valls qui présidait l'inauguration.Ensuite, après avoir écrit à tout le monde, au Premier Ministre, à la Région, à la mairie de Perpignan, à la directrice du mémorial, nous avons été mis en contact avec Serge Klarsfeld qui, grâce à son entregent, a pu obtenir que cette stèle soit bâtie, après cependant 3 ans d'efforts. Nous sommes passés aux actualités régionales sur FR3 en octobre 2018, pour l’inauguration de cette stèle, avec Peter...
Il faut dire que ces soldats allemands avaient été martyrisés par les français qui se sont vengée honteusement sur des hommes sans défense : malnutrition, maladies non traitées, déminage des plages etc.., Environs un millier sont décédés entre mai 1945 et décembre 1946, sur 10000. Alors que, fuyant l'avance de l'armée rouge, ils s'étaient jetés dans les bras de américains, lesquels en ont livrés environ 10000 aux français. Il semblerait qu'il y a eu d'autres cas de ce genre; en particulier en Angleterre.
A la suite, de cela, nous avons eu l'honneur d'être invités, Chantal et moi, par son excellence l'ambassadeur d'Allemagne, dans sa résidence privée, le superbe Hôtel de Beauharnais, rue de Lille à Paris, sur les bords de la Seine..L'ambassadeur d'Allemagne et notre ami de Munich, Peter Eisenbach, ont reconnu que, seul un juif rescapé de ce camp de Rivesaltes pouvait réussir à obtenir que cette stèle pour les soldats allemands puisse être érigée.
Amicalement.
Raoul
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