Zohran Mamdani balaye Andrew Cuomo
- Raoul Salzberg

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Lors des élections à la mairie de New York du 5 novembre 2025, le candidat démocrate Zohran Mamdani l’a emporté avec plus de 50 % des suffrages exprimés sur le candidat indépendant Andrew Cuomo avec 41 % des suffrages et le candidat républicain Curtis Sliwa avec 7 % des suffrages. Zohran Mamdani commencera son mandat le 1er janvier 2026. Il y a eu 40 % de votants, un record pour New York.
Ces élections municipales se passent au scrutin uninominal à un tour, pour un mandat de 4 ans, renouvelable une fois.
Auparavant, Zohran Mamdani avait gagné la primaire démocrate le 24 juin 2025 avec 43 % des suffrages exprimés contre 36 % pour Andrew Cuomo, lequel a choisi quand même de se présenter avec l’étiquette indépendant, avec le soutien du président Donald Trump, mais aussi ceux de l’ancien maire Michael Bloomberg et de l’ancien président américain Bill Clinton.
Rien n’a pu arrêter la marche en avant de Zohran Mamdani, 34 ans, musulman pro-palestinien, socialiste, encore inconnu il y a un an.
Andrew Cuomo
Andrew Cuomo a été 11 ans gouverneur démocrate de New York de 2011 à 2021. Il avait dû démissionner en août 2021, accusé de harcèlement sexuel par 11 femmes. Il était aussi accusé d’avoir approuvé, lors de la pandémie du Covid, le retour de personnes âgées hospitalisées dans leurs maisons de retraite, ce qui avait provoqué une hécatombe.
A 68 ans, ce fleuron d’une dynastie démocrate, n’avait pourtant pas ménagé sa peine, se faisant soutenir par Donald Trump contre le candidat républicain Curtis Sliwa.
Ce sale type, comme le caractérisait l’ancien maire démocrate de New York Bill de Blasio, était hargneux et sans scrupules envers les élus trop à gauche de l’Assemblée de l’État.
Quelques réalisations progressistes à son crédit lui avaient assuré une certaine estime auprès des New Yorkais (instauration du mariage gay, augmentation du salaire minimum, lois de contrôle des armes à feu les plus strictes du pays, congés maternité). De même que de spectaculaires réalisations financées sur fond de l’État (pont Tappan Zee restauré et rebaptisé Mario Cuomo du nom de son père, splendides rénovations de l’aéroport la Guardia et de la gare Penn Station).
Il s’était intronisé le candidat de la raison et de l’expérience. Multipliant les pubs télévisées, il stigmatisait son adversaire musulman, l’accusant de laxisme et de naïveté d’intello.
Soutenu par Trump, il chassait sur les terres de MAGA, comme le fief droitier de Staten Island. Sur le plateau télévisé de Sid Rosenberg, ancien gouverneur et ardent défenseur d’Israël, il proposait d’organiser la défense de Benjamin Netanyahou contre la Cour Pénale Internationale. Reprenant les clichés raciaux des républicains, il assurait que « la diversité de New York est une force mais aussi une faiblesse ».
Les quartiers de New York ayant voté démocrate sont : le Bronx, Manhattan, Brooklyn et le Queens.
Seul, le quartier de Staten Island a voté républicain.
La population juive représente 7 % des habitants de New York, la plus nombreuse avec Tel-Aviv.
Curts Sliwa
Le candidat républicain, Curtis Sliwa, est ex-leader des « Guardian Angels », mouvement de cogneurs soi-disant justiciers, avec leurs blousons et bérets rouges, qui semaient leur justice dans les rues de New York et dans le métro newyorkais. Sommé par Trump de se désister pour Andrew Cuomo, afin de faire barrage au communiste Zohran Mamdani, il a refusé, arguant de ses 21 % d’intentions de vote. Le chouchou des 30000 policiers du NYPD, pour les avoir défendus contre les coupe budgétaires de la mairie démocrate, il est hostile à l’ICE, l’agence fédérale de l’immigration et des douanes. Iconoclaste au sein du parti républicain, il défend le mariage gay, prône la séparation de l’Eglise et de l’État, réclame le droit à l’avortement, se prononce pour le contrôle des armes à feu, et même pour la création d’un revenu universel garanti pour les plus démunis. Il milite aussi pour la défense des droits des animaux, avec sa femme, Nancy Regula, avocate et militante de la cause animale. Curtis Sliwa s’est présenté sur 2 listes électorales parallèles, celles du parti républicain, et celles du mouvement « protect animals ».
Eric Adams
Maire sortant démocrate de New York, élu en 2021, il s’est retiré de la campagne municipale le 28 septembre 2025, se désistant pour Andrew Cuomo.
Eric Adams a été inculpé en septembre 2024 pour financement illégal de campagne électorale et pour corruption. Trump, par l’intermédiaire de son département de la justice, a ordonné aux procureurs d’abandonner les poursuites judiciaires contre Eric Adams. Cela a indigné le conseil municipal qui a appelé à la démission d’Eric Adams.
L’affaire ayant été classée le 2 avril 2025, Eric Adams a décidé alors de se représenter à la mairie de New York en tant qu’indépendant. Puis, finalement, sur les injonctions de Trump, il a choisi de se désister pour Andrew Cuomo.
Zohran Mamdani
Zohran Mamdani fait parti de l’aile gauche du parti démocrate, celle de Bernie Sanders sénateur du Vermont, pour lequel il a milité en 2016
Il est musulman, favorable aux palestiniens (il accuse Israël de génocide), et est classé comme communiste, ce qui, aujourd’hui encore, est considéré comme une injure par une partie importante de la population américaine. Mais les mentalités changent aux États-Unis, surtout auprès des jeunes, à l’image de la génération Gen Z, celle qui manifeste partout dans le monde, contre les élites corrompues.
Il a axé sa campagne sur la question du gel des loyers et la promesse de construire 200 000 logements à loyer modéré. New York a des loyers très chers, pour en moyenne 4000 $ (3500 €) par mois.
Il veut aussi rendre New York abordable en créant des épiceries publiques à prix réduit.
Il veut enfin rendre gratuits les bus et les crèches publiques.
Il prône la taxation des grandes fortunes.
90000 volontaires, essentiellement des jeunes, l’ont soutenu pendant la caampagne.
Son discours pour une vie meilleure est bien mieux perçu que celui de Kamala Harris qui a axé sa campagne présidentielle sur les valeurs. Il profite de l’état de délabrement dans lequel est plongé le parti démocrate.
Il accuse Donald Trump d’être un voleur et un escroc. Mais celui-ci, pas rancunier, est venu le voir à New York, après l’élection municipale, en le considérant comme un ami. Il faut dire que Trump en veut à mort aux démocrates pour leur campagne sur l’affaire Jeffrey Epstein, au centre d’un scandale sexuel de prostitution. Dans la prude Amérique, cela fait désordre. Andrew Cuomo avait pourtant prédit que, en cas de victoire de Mamdani, Trump prendrait le contrôle de New York .
L’establishment du parti démocrate américain, à quelques exceptions près, est vent debout contre Zohran Mamdani. Comme Chuck Schumer, patron des sénateurs démocrates, ou Hakeem Jeffries chef du parti démocrate à la chambre des représentants.
Mais Zohran Mamdani est soutenu par Kathy Hochul, très centriste gouverneure de New York, indispensable pour valider un budget de 7 milliards de $ supplémentaires pour l’application de ses mesures phare. Il a accepté de soutenir Jessica Tisch à la tête de la police, la NYPD. Il a aussi obtenu la neutralité de la procureure générale de New York, Letitia James. Il faudra que Mamdani trouve un accord avec les promoteurs immobiliers, pour qu’il puisse emprunter au privé 70 milliards de $, en plus des 30 milliards de $ dont il dispose.
Les jeunes aujourd’hui, dans le monde entier, privilégient les questions de l’inflation, du coût de la vie et de l’emploi. Et seulement 16 % des jeunes américains continuent à considérer que la démocratie fonctionne aux USA.
La génération Z ou Gen Z
La génération Z — ou Gen Z dans la presse —, souvent appelée les zoomers, regroupe les personnes nées entre la fin des années 1990 et le début des années 2010, généralement entre 1997 et 2012. Elle succède à la génération Y et précède la génération Alpha. Elle est définie comme une génération née alors que les communications numériques étaient déjà bien installées dans la société.
Dans le monde entier, des jeunes manifestent contre la corruption des élites, contre le manque de démocratie, contre des gouvernements incapables et sourds.
La liste de ces pays, depuis un an, est impressionnante : Birmanie, Bangladesh, Népal, Indonésie, Philippines, Timor-Leste, Maldives, Sri Lanka, Madagascar, Maroc, Pérou, Sénégal, Serbie, Kenya,
etc,,,
Dans les déclencheurs des mobilisations, il y a d'abord la volonté des jeunes de défendre des biens communs essentiels, leur refus d'être dépossédés de manière très concrète d'éléments de survie de base: santé, sécurité, représentation politique.
Mais ces revendications locales montrent des aspirations très communes contre la spoliation et les abus des Etats, et de l'oligarchie économique et politique qui les dirigent.
A Madagascar, l'armée a pris le pouvoir après la fuite du président et a nommé un gouvernement faisant la part belle au sérail politique, qui rebute la Gen Z.
A l'inverse au Népal, les activistes ont choisi la Première ministre intérimaire, l'ex-cheffe de la Cour suprême Sushila Karki, désignée après un vote sur la plateforme Discord. Elle a depuis nommé une commission pour faire la lumière sur la mort de jeunes tués lors des manifestations.
Au Maroc, les manifestants ont obtenu quelques mesures de modernisation de la vie publique et des efforts budgétaires, avec notamment la création et la rénovation d'hôpitaux.
Après ces quelques mois de révoltes échevelées, les mobilisations se sont pour l'heure taries.
Et si des noyaux de militants "Gen Z" sont organisés, leur caractère spontané, horizontal et peu structuré, ainsi que leur absence de leadership, ne leur permet pas pour l'heure de proposer un projet politique au-delà des revendications initiales.
La répression policière massive et parfois meurtrière des manifestations a également empêché ces mouvements d'aller plus avant. Fin octobre, plus de 2.400 personnes, dont plus de 1.400 placées en détention, faisaient l'objet de poursuites à la suite des manifestations au Maroc.
Au Népal, "on est dans la deuxième phase du mouvement" qui mène jusqu'aux élections prévue mars 2026, a expliqué à l'AFP un des manifestants, Yujan Rajbhandari. Quelques figures ont émergé mais elles n'ont pas rejoint le gouvernement. Le mouvement, qui continue à cibler la corruption, sensibilise désormais à l'inscription sur les listes électorales, sur le terrain comme en ligne.
Yujan Rajbhandari le promet: "On n'arrêtera pas."
Au Népal au Pérou en passant par Madagascar, la révolte de la jeunesse portée par des revendications socio-économiques a désarçonné les Etats. Mais son mode de mobilisation horizontal, issu de la culture numérique, handicape aujourd’hui ses débouchés politiques.
La jeunesse n’a pas attendu la génération Z pour descendre dans la rue. De Mai 68 aux « printemps arabes » de 2011, elle n’a pas cessé de fournir le gros des bataillons des soulèvements populaires et des révoltes.
Alors pourquoi la récente focalisation sur cette fameuse Gen Z dont les mobilisations en cascade secouent ou ébranlent les pouvoirs depuis 2024, avec un effet accélérateur ces derniers mois ? Du Bangladesh à Madagascar, en passant par le Maroc, le Népal, l’Indonésie, le Kenya ou le Pérou, une sorte d’internationale juvénile est entrée dans l’arène contestataire. Ce surgissement a pris de vitesse les Etats et laissé à l’écart des classes politiques souvent discréditées.
Chaque mobilisation s’inscrit dans un contexte national singulier. Pourtant, bien des similitudes rassemblent ces indignés du Sud global. Au-delà de leur jeunesse, ils brandissent les mêmes mots d’ordre contre la corruption, le népotisme, les inégalités, le chômage, la dégradation des services publics, etc. Leurs doléances sont surtout socio-économiques, ce qui les distingue de leurs aînés dont les aspirations étaient plus expressément politiques (nationalisme, socialisme, démocratie…). Par cette orientation pragmatique, ils ont suscité une sympathie dans la population, allant très au-delà de leur tranche d’âge, les élevant à leur insu au rang de gardiens de l’intérêt général – voire de vigies morales – dans des pays ravagés par le cynisme et la trahison des élites.
Népal, Indonésie, et plus récemment Madagascar et Maroc : on pourrait allonger la liste encore longtemps, en passant par quatre continents, pour recenser tous les pays où la jeunesse s’est révoltée dans les dernières semaines.
Ces soulèvements spontanés, bien que séparés par des océans, ont tous en commun la colère d’une nouvelle génération née grosso modo entre 1997 et 2012. Une cohorte qui s’affiche fièrement sous l’appellation Gen Z sur le web et dans la rue, et qui – mondialisation oblige – partage des références communes d’un continent à l’autre.
Tour d’horizon du phénomène et de ses principales incarnations.
Dans les dernières semaines, l'étincelle la plus visible de ce mouvement génération Z est allumée début septembre, au Népal. En réponse à un bannissement national des réseaux sociaux par le régime en place, les jeunes envahissent les rues du pays, dénonçant au passage la corruption et les inégalités. Le mouvement réussit à chasser le président népalais du pouvoir après quelques jours de protestations.
Comme un effet domino, les comptes TikTok et serveurs Discord avec la mention génération Z se sont multipliés dans d’autres pays du monde, appelant les jeunes à sortir dans les rues pour exiger de meilleures conditions de vie, voire exiger la démocratie.
Cela change des incantations de Macron et des médias pour armer militairement la jeunesse, pour qu’elle soit prête à combattre un ennemi quelconque, d’ici 5 ans. La menace identifiée comme celle de la Russie est nulle et non avenue, puisque Poutine a dit et répété qu’il n’a pas l’intention d’attaquer l’Europe.
Cela change aussi des cris au terrorisme, surtout islamiste, alors qu’aucune de ces menaces n’apparaît clairement à l’horizon. C’est du bavardage Zemmourien, pour faire diversion.
La Gen Z est dans le vrai, pas Macron ni les hurleurs au péril islamiste, qui sont ridicules et grotesques.



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